dimanche 25 septembre 2011

Une école moderne sauve ses élèves de l'échec.

Voici quelques réflexions pédagogiques qui ont le mérite d'exister et qui demandent certainement d'être discutées ensemble lors des concertations communes et par cycles.
    Nos derniers programmes officiels de référence contiennent à n'en point douter une quantité certaine de matières à enseigner. Parmi toutes celles-ci, il nous faut discriminer " l'essentiel " de " l'accessoire " en rédigeant par exemple un solide plan de formation ( curriculum) afin de consacrer exclusivement notre temps scolaire à la maîtrise, pour tous nos élèves, de cet " essentiel ".
    D'abord, il nous faut, tant en secondaire général, qu'en technique, qu'en professionnel et qu'en graduat réfléchir ensemble sur les capacités terminales dont tous nos élèves de 18 ans et tous nos élèves de 21 ans doivent être équipés lorsqu'ils quittent nos sections. Pour cela, nous réfléchirons à la question suivante :
    " Qu'est pour nous un bon élève de rhétorique, de 6ème technique de transition électro-mécanique, un bon élève de 6ème boulangerie, une bonne infirmière, une bonne assistante sociale ? ".
    Nos réponses permettront d'établir un plan de formation cohérent pour les élèves dont nous avons la responsabilité. Nous diviserons ces diverses capacités en 36 semaines et constituerons de cette manière un " cahier de matières " qui aura du sens pour chacun d'entre nous. C'est, me semble-t-il, un travail primordial à réaliser étant donné qu'il sera le fil conducteur de notre action pédagogique quotidienne au sein de nos classes.
    Ensuite, il faudra convaincre nos élèves de transformer leur " envie de savoir " en " désir d'apprendre " et ainsi répondre à l'interrogation suivante :
" Apprendre, oui mais comment ".
    Si on veut que s'installe, chez l'apprenant, avec de grandes chances de succès, un apprentissage, il faut que celui-ci ait du SENS et plus encore, de la PERTINENCE pour l'apprenant.
    En effet, les découvertes scientifiques récentes sur le fonctionnement du cerveau ( voir Sousa dans les théories de l'apprentissage) nous apprennent que la mémoire de travail s'interroge seulement de deux façons pour décider si quelque chose sera sauvegardé ou éliminé :
    1. Est-ce que cela a du sens ?
          Puis-je comprendre ce que l'on veut m'inculquer sur la base de mon expérience ?
        *  Est-ce que cette information " colle " à ce que je sais de la façon dont le monde fonctionne ?
        *  Quand l'apprenant dit : " je ne comprends pas " cela signifie qu'il éprouve de la difficulté à saisir le sens de ce qu'on cherche à lui transmettre.
    2. Est-ce que cela est pertinent ?
        *  Dans quel but l'apprenant devrait-il s'en souvenir ?
        *  La signification " très subjective " est grandement influencée par le passé d'une personne.
        *  Quand un apprenant demande : " pourquoi dois-je savoir cela ?, quand l'occasion d'utiliser cette connaissance se présentera-t-elle ? indique qu'il ne perçoit pas la pertinence de cet apprentissage.
    Chaque jour, en classe, les apprenants entendent des choses qui ont du sens mais qui manquent de pertinence. Il se peut qu'ils suivent diligemment les directives de l'enseignant pour accomplir un travail répétitif, et ils peuvent même trouver les réponses correctes ; mais s'ils n'ont pas saisi la pertinence de l'activité, il est peu probable que les informations soient stockées à long terme. C'est par exemple le cas de Julien, qui explique qu'il a fait un " bon de commande " au cours d'informatique, alors qu'il s'agissait de découvrir les fonctions de base d'un tableur. On voit bien que très souvent il y a un gouffre entre les intentions de l'enseignant et ce qu'en comprend l'apprenant.
    En effet, il est essentiel d'apprendre à l'apprenant à faire des ponts entre ses diverses connaissances, à établir des liens entre ce qu'il apprend dans différentes matières, mais aussi ce qu'il peut entendre à la radio, à la télévision ou lire dans un journal. Cette démarche lui permettra de donner du sens et de la pertinence à ses connaissances et de les mobiliser pour répondre à des problèmes nouveaux. Car là est le but de tout apprentissage : aider l'apprenant à s'approprier des outils dont il puisse se servir de façon autonome pour qu'il ne soit pas le réceptacle passif d'une somme de connaissances qu'il empile sans en comprendre ni le sens ni la pertinence. Car tous les apprenants ne possèdent pas d'emblée les clés du fonctionnement scolaire.
    Les enseignants passent 90 % de leur temps de planification à élaborer des cours de manière à ce que les apprenants comprennent le sens. Or, pour convaincre le cerveau de l'apprenant de persister dans l'atteinte de cet objectif, les professeurs devraient se soucier davantage de l'aider à bâtir de le pertinence.
     EX. La règle de trois ne peut être comprise ( connaissance ) donc employée à bon escient ( compétence ) que si elle a de la pertinence pour l'apprenant et qu'elle s'utilise dans un contexte qui lui est familier ( sens ).
    Dans une classe de la section pâtisserie, on veut fabriquer des bûches pour le goûter de Noël. Les apprenants ont découvert une recette pour 6 personnes et la section entière compte 38 apprenants. Comment faire ?
    Nous ajouterons encore que pour optimaliser un apprentissage quelconque :
    D'abord, il faut savoir ce que l'on va exactement demander aux apprenants de réaliser donc définir le plus clairement possible la compétence disciplinaire ( objectif opérationnel ) que les apprenants devront atteindre. Il serait intéressant de voir cette compétence écrite dans un Journal de Classe ou dans une préparation.
    Ensuite, lorsqu'on avance dans cet apprentissage et que l'on questionne l'apprenant, il est bon de se demander : " l'apprenant a-t-il la réponse sous les yeux où doit-il la construire ". Il est évident que tout l'intérêt de cette séquence réside dans la seconde alternative.
    Enfin, arrivant au terme de l'apprentissage, on demandera à l'apprenant ce qu'il a appris ( synthèse ) et on l'invitera à reformuler ce qu'il croit avoir compris et aussi et surtout d'inventer des situations différentes où il pourra utiliser ce qu'il vient d'apprendre ( recontextualisation ).
    Ce que tu viens d'étudier, tu pourras l'utiliser où - comment - quand ? Cherche 5 situations. Que peux-tu faire en dehors de la classe avec ce que tu viens d'étudier ?
    L'hétérogénéité sociale des apprenants est ici un fameux atout parce qu'elle va enrichir la classe de situations différentes qu'il faudra discuter, vérifier avec l'aide de l'enseignant.
Apprendre à apprendre : réalité ou illusion ?
 Les déterminants environnementaux de la réussite scolaire.
    1.  Les enfants qui réussissent bien à l'école ont un environnement qui :
          *  aide à explorer ... tu veux savoir quelque chose .... et bien cherche.
          *  encourage à anticiper les conséquences d'une action future .... imagine ce qui peut se passer si ......
          *  encourage à l'auto-évaluation .... demande-toi si tu as réussi ou pas ? .....
          *  donne des feed-backs positifs .... parmi tout ce que tu as fait, je trouve que ceci est bien.
          *  fait REFORMULER.

    In fine, les enfants qui réussissent bien à l'école ont un environnement qui pose des questions.
    2.  Les enfants qui réussissent moins bien à l'école ont un environnement qui :
          *  informe sur des programmes ... tu veux savoir quelque chose ... et bien tu fais ceci, cela et encore cela .....
          *  explique directement ce qu'il faut faire .... tu fais cela parce que je le sais et cela n'est pas négociable
          *  évalue de l'extérieur les résultats de l'action .... c'est bien / c'est mauvais .....
          *  donne des feed-backs négatifs .... pointe ce qui est échec ...
        *  adopte ou rejette .... c'est idiot / c'est intelligent.
    In fine, les enfants qui réussissent moins bien à l'école ont un environnement qui donne des réponses.
   Cette recherche a été menée par Philippe Meirieu auprès des enfants fréquentant les écoles de la région de Lyon et se termine par une question plutôt intéressante et qui mérite, elle aussi, une réflexion en équipe éducative : " Dans quelle colonne, à votre avis, placeriez-vous les comportements scolaires dominants ?".
   Enfin, il faut s'assurer que l'enseignement est maîtrisé, donc évaluer l'efficacité de l'action pédagogique entreprise. Dans cette optique, il semble intéressant d'abord de prévenir les apprenants du moment précis de l'évaluation ; ensuite, de pratiquer le plus souvent possible une évaluation formative en pensant qu'il est dans la nature même de l'école d'être le lieu de l'erreur possible, le lieu de l'erreur bénéfique, le lieu où il faut se tromper beaucoup et comprendre ses erreurs pour ne plus plus se tromper quand on sort de l'école (Philippe Meirieu) et enfin, quand on perçoit que tous les apprenants peuvent réussir, on leur propose une évaluation normative solidement pensée  avec niveaux taxonomiques différents, critères de succès, points par question ... etc ...
    Il me semble que pratiquant ainsi, notre rendement scolaire s'en trouvera fort amélioré et ferait taire les plaintes qui émanent de toutes parts tant il est vrai que les redoublements, les échecs, les décrochages scolaires et la déperdition scolaire inquiètent, à juste titre, les responsables de l'éducation.
    " Apprendre à travailler " serait donc aider les apprenants à décontextualiser et à recontextualiser c'est-à-dire parier sur leur intelligence et ainsi les faire vraiment progresser.
    Le véritable apprentissage ( et non dressage ), l'efficacité intellectuelle consiste à identifier le type de problème posé et, dans chaque cas, mettre en oeuvre l'outil spécifique et pertinent qui permettra d'obtenir une solution adéquate et acceptable selon les connaissances du moment.
    Philippe Meirieu est né en 1949 à Alès, dans le Gard, au sud de la France. Très tôt, il a milité dans des mouvements d'Education populaire.
Il a fait, après un baccalauréat littéraire, des études de philosophie et de lettres à Paris. Il a préparé et obtenu un CAP d'instituteur pour enseigner dans le premier degré. Il a été successivement professeur de français en collège et de philosophie en terminale, avant de prendre des responsabilités pédagogiques et administratives. Tout au long de celles-ci, il a toujours conservé des charges d'enseignement auprès d'élèves et d'étudiants. Il a soutenu une thèse d'Etat es Lettres et Sciences humaines en 1983 et est aujourd'hui professeur des universités en sciences de l'éducation. Il fut responsable pédagogique d'un collège expérimental  de 1976 à 1986, rédacteur en chef des Cahiers pédagogiques de 1980 à 1986, formateur d'enseignants et directeur de l'Institut des sciences et pratiques d'éducation et de formation de l'université Lumière-Lyon 2. Il participa à la création des instituts universitaires de formation des maîtres et à celle du Conseil national des programmes. Il dirigea l'Institut national de recherche pédagogique de juin 1998 à mai 2000, s'efforçant d'associer, dans une même dynamique, innovation et recherche. Il a terminé, en 2006, son mandat de directeur de l'IUFM de l'Académie de Lyon et repris ses activités de professeur à l'université Lumière-Lyon 2. Il est aussi responsable pédagogique de la chaîne de télévision pour l'éducation CAP Canal. Il dirige la collection "Pédagogies" chez ESF éditeur. Il a reçu la Légion d'honneur des mains du Président de la République française.
   Envisageons maintenant l'opportunité des travaux à domicile.
      *  Tout un chacun s'accorde pour dire que face aux devoirs à domicile, les apprenants n'ont pas tous la même chance tant il est vrai que la disparité des milieux socio-culturels est énorme. ALORS !!!
      *  D'autre part, une recherche effectuée sur 10.000 apprenants ( Philippe Meirieu ) a montré que lorsque les devoirs étaient réalisés en classe, ils étaient réussis par 88 % des apprenants et lorsque ces mêmes devoirs étaient effectués à domicile, seulement 36 % des apprenants les réussissaient. ALORS !!!
      *  Il est tout aussi évident que les recherches dans des ouvrages de références ou sur Internet et l'apport de documentation à l'école répondent aux mêmes critères. ALORS !!!
    Dans ces conditions précises que faire ?
    *  Simplement demander aux apprenants de compléter, de terminer un travail entrepris en classe ou une autre activité qui ne demande pas l'intervention de la famille.
      EX. : une recopie, terminer un schéma, remettre de l'ordre dans une farde .....
    *  Mais surtout leur demander d'étudier et au départ de ces leçons, leur apprendre à étudier car l'école crée l'échec si elle tient pour acquises des méthodes d'étude dont elle n'a pas organisé l'apprentissage. S'il est vrai qu'il n'y a pas une et une seule manière d'étudier, il est tout aussi vrai qu'il existe des méthodes d'étude ( lire - écrire - dire ) et de travail auxquelles l'école se doit d'attacher autant d'importance qu'à l'enseignement des matières sinon elle est responsable d'une énorme lacune dans la formation de l'apprenant. Car, et je le répète, tous les apprenants ne possèdent pas d'emblée les clés du fonctionnement scolaire.
    Les méthodes d'étude sont le moyen indispensable pour transformer peu à peu des apprenants dépendants en des apprenants autonomes et qui ont gardé le désir d'apprendre : le succès renforce, en effet, le goût de l'étude, car l'apprenant cherche, comme tout un chacun, à trouver des satisfactions dans toutes ses activités.
    Sinon, parler d'autonomie des jeunes ( mot présent sur chaque page de nos programmes ) à qui l'école n'apprend pas de méthodes d'étude et de travail, est un jeu de mot dérisoire et, pour parler franchement, une escroquerie intellectuelle.
    Cette façon de travailler est, me semble-t-il, un des moyens d'éviter que l'injustice sociale se traduise de manière systématique en injustice scolaire.
    Aujourd'hui, de toutes parts et de partout, le redoublement semble très sérieusement remis en question !!!
 Redoublement :
    1.  Symptôme de l'échec scolaire. Mais l'échec scolaire ne traduit-il pas le fait que l'école elle-même soit en échec ? En effet, dans une institution obligatoire, un système qui crée de l'échec est lui-même en échec.
    2.  Le redoublement n'est rien d'autre que la répétition, d'un point de vue méthodologique, du parcours déjà effectué par l'apprenant l'année précédente sans que l'on se soit réellement préoccupé de ses besoins. Cette situation engendre un manque d'épanouissement personnel et l'arrêt du progrès individuel.
    3. Solution de dernier recours, dit-on, après avoir essayé différents autres moyens d'aide. Mais depuis toujours on parle de " mauvais élèves ", d'élèves qui échouent, d'élèves difficiles ... etc ... Vocabulaire et culture de l'échec, vocabulaire et culture de l'excellence ... Or à répéter sans cesse que quelqu'un est nul, il finit par y croire !!! ( Je dis " JE " parce qu'on m'a dit " TU " : Albert Jacquard ). Carcans desquels l'on ne peut plus s'évader, les termes et vocabulaires limitrophes de l'échec scolaire sont dangereux car pouvant engendrer une exclusion sociale. Il n'y a pas d'apprenants difficiles, il y a des apprenants en difficulté.
     Albert Jacquard, né à Lyon en 1925, est un scientifique et un 
Albert Jacquard en 2009
essayiste français. Il est ingénieur, docteur en génétique et en biologie humaine. A l'âge de 9 ans, un drame bouleverse son enfance. La voiture familiale subit un accident dans lequel Albert Jacquard perd son plus jeune frère. Lui-même en ressort défiguré, ce qui transformera longtemps sa perception du regard des autres ( " j'ai cru qu'ils me méprisaient " ). Il a enseigné dans plusieurs universités en France et à l'étranger : Genève - Paris 6 - Louvain la Neuve. Vulgarisateur scientifique, grand humaniste, philosophe et auteur de 52 publications, il a fait le tour du monde pour sensibiliser l'opinion publique aux défis de la société contemporaine tout en participant activement aux débats actuels qui portent sur la responsabilité de l'être humain face à sa destinée. Il consacre aujourd'hui l'essentiel de son activité à la diffusion d'un discours humaniste destiné à favoriser l'évolution de la conscience collective. Il est membre du Comité consultatif national d'éthique. Son travail lui valut une reconnaissance nationale. Il fut nommé officier de la Légion d'honneur et commandeur de l'Ordre national du Mérite en 1980.
   4. Héritage de la pédagogie napoléonienne basée sur la sanction. Ainsi, les systèmes éducatifs des pays francophones sont marqués par une culture de l'échec : " le bon prof " fait preuve d'exigences et, par conséquent, a des échecs. Celui chez qui tous les apprenants réussissent est taxé de laxisme. De surcroît, beaucoup de professeurs, de directeurs, mais aussi de parents croient que si la menace de l'échec était supprimée, les apprenants ne travailleraient plus. Ainsi, pour beaucoup, l'école ne pourrait vivre sans cette épée de Damoclès, dont la menace fait travailler les apprenants. Mais lorsqu'à partir des performances et des comportements des apprenants, le professeur porte un jugement sur leurs compétences et leur attitude, il devrait toujours garder à l'esprit qu'il évalue non seulement le résultat de leur apprentissage, mais aussi celui de son enseignement
    5. Révélateur des grands maux du système éducatif.
        5.1. Difficulté de prendre en compte l'hétérogénéité des apprenants et la diversité de leurs rythmes de progression. Il n'existe pas d'excellent ou de mauvais apprenants, chacun possède le don nécessaire à son cheminement individuel.  L'apprenant dont le bulletin scolaire trimestriel est ponctué de mauvaises notes dans les langages fondamentaux que sont le français et la mathématique, n'est pas en échec scolaire. Cet apprenant, en effet, peut s'avérer être plus tard un brillant sportif, artiste, styliste, artisan, j'en passe et des meilleurs ... Pour preuve,  il n'y a pas une intelligence mais des intelligences. " L'intelligence " au singulier n'existe pas. Ainsi, estimer que certaines formes d'intelligence sont plus fondamentales que d'autres est une erreur et reflète notre véritable système de valeurs. ( Voir les intelligences multiples de Howard Gardner ) Cette vision représentée par le courant génétique et bien que n'ayant plus guère de crédit de nos jours dans la communauté scientifique reste hélas bien vivace dans les mentalités.
    Howard Gardner, né aux U.S.A., en 1943, est professeur de psychologie
de la connaissance et directeur général du Project Zero à la Harvard Graduate School of Education. Il est aussi professeur auxiliaire de neurologie à l'université de médecine de Boston. Ses recherches se concentrent sur le développement et la détérioration des capacités cognitives humaines. Il demeure étonné de constater que des malades privés d'une faculté intellectuelle bien précise sont parfaitement capables d'en assumer d'autres. Il en conclut qu'il doit y avoir des formes différentes d'intelligence, indépendantes les unes des autres, dans la mesure où, lorsque certaines sont détruites, les autres ne sont pas affectées. Il est en rupture avec la théorie commune traditionnelle qui repose sur deux croyances fondamentales : 1. L'intelligence est une entité unique dont on hérite à la naissance (déterminisme le plus lourd). 2. L'intelligence des individus peut être décrite adéquatement en la quantifiant (Q.I.). Célèbre dans le monde entier, Howard Gardner jouit d'une grande renommée dans le milieu de l'éducation pour sa théorie des intelligences multiples qui suppose l'existence d'un certain nombre de capacités intellectuelles relativement autonomes au sein de chaque être humain. Il participe par ailleurs à la réforme de l'éducation, et s'intéresse plus particulièrement à l'évaluation, la prise en compte des différences individuelles face à l'apprentissage, et au développement professionnel des enseignants. Il est l'auteur de plus de 400 articles publiés dans des journaux spécialisés et de 20 livres dont : " Frames of Mind : the Theory of Multiple Intelligences en 1983 ".  
    Le courant génétique explique l'échec scolaire par des troubles et déficiences intrinsèques à l'individu qui peuvent être détectés à travers des tests. Déjà en 1917, Lewis, Madison Terman  écrivait : " il est presque certain que le fait que les apprenants des classes supérieures réussissent mieux aux tests provient surtout de la qualité supérieure de ce qu'ils ont reçu à la naissance ". Les tenants de ce courant affirment que la réussite scolaire est fonction de l'intelligence inscrite dans le patrimoine génétique et mesurable par le quotient intellectuel. Il convient cependant de souligner que les concepts utilisés et le contenu de ces tests sont marqués socio-culturellement. La référence par rapport à une norme nie les différences et les multiples rapports au savoir existant dans les groupes sociaux. Par ailleurs, les tests du quotient intellectuel aboutissent à un classement hiérarchique des individus, qui va de pair avec une certaine idéologie. En effet, d'après cette théorie, l'intelligence étant déterminée biologiquement, les individus ne sont pas, par nature, dotés de la même intelligence. D'où la fonction essentielle de l'école est de sélectionner les meilleurs éléments pour en faire une élite au service du pays !! Certains se sont basés sur ces conclusions pour postuler le caractère naturel de l'inégalité entre les êtres humains et récuser ainsi toute politique d'égalité des chances et toute remédiation à l'échec scolaire. D'après eux, l'échec scolaire légitime la sélection des individus en fonction d'une nature qui les destine à des tâches serviles et leur répercussion au niveau de la réussite scolaire va de soi.
    Lewis Madison Terman (1877 - 1956 ) est né à Johnson County, dans  l'Indiana, et fit ses études au Central Normal College de Danville et à l'université de l'Indiana. Il obtint son doctorat à la Clark University en 1905.

Il enseigna la psychologie et la pédagogie à la State Normal School de Los Angeles de 1906 à 1910 puis rejoignit l'université Stanford comme titulaire de la chaire d'Education. Il est connu d'une part pour ses travaux sur les tests d'intelligence et ses expériences d'éducation avec les enfants surdoués et d'autre part pour la batterie de tests établie en association avec le psychologue Merill à partir de l'échelle de Binet - Simon, et destinée à mesurer le développement intellectuel des enfants dès l'âge de 3 ans jusqu'à l'âge adulte. Terman développa l'utilisation du Quotient Intellectuel (QI) de William Stern, adaptant ainsi les tests de Binet-Simon à la mesure du niveau intellectuel des enfants. En coopération avec Miles, il élabora un test destiné à repérer les différences entre les hommes et les femmes sur le plan psychologique. Parmi ses nombreux ouvrages, non traduits à ce jour, figurent The Measurement of Intelligence de 1916 et The Intelligence of School Children de 1919.

    William Stern ( 1871 - 1938 ) était un psychologue allemand. Il fut à
la base des effotrs réalisés en psychologie  pour mesurer l'intelligence, c'est-à-dire le quotient intellectuel ( Q.I. ). Il a soutenu sa thèse de psychologie à l'Université de Berlin en 1893. Il fut membre fondateur de la Société allemande de psychologie ,en  1905. Il fut titulaire de la chaire de pédagogie à l'Université de Breslau puis fut appelé à l'Université de Hamboug en 1916, où il exerça comme professeur de philosophie. De 1919 à 1933, il fut directeur de l'institut de psychologie de l'Université de Hambourg, puis, de 1933 à 1938, lecteur et professeur à l'Université de Durham aux USA. Stern a combiné la philosophie et l'approche scientifique dans le but d'étudier la nature humaine, ce qui fut une contribution majeure pour la psychologie naissante. En effet, Stern fut peut-être le premier théoricien à décrire la manière de combiner les études physiques et mentales dans le but de décrire " l'être humain dans sa totalité ". Il tenta une synthèse entre la psychologie expérimentale et la psychologie compréhensive. Il établit une théorie dite de la " convergence ". Pour lui, c'était en étudiant l'individualité de chacun que l'essence réelle de la personnalité et de l'intelligence seraient découvertes. Son intérêt pour les différences individuelles mena au développement du concept de quotient intellectuel, le Q.I. La conception du Q.I. impliqait la division de l'âge mental ( mesuré par des tests) de l'enfant par son âge physique. L'intelligence mesurée devient donc une valeur relative. Cette notion a perduré jusqu'à nos jours, du moins dans une forme modifiée par la notion de " déviation " proposée par David Wechsler.
    Alfred Binet ( 1857 - 1911 ) est un pédagogue et psychologue
français. Il est connu pour sa contribution essentielle à la psychométrie. A la fin de ses études secondaires au Lycée Louis-le-Grand à Paris, il débute des études de droit ( licencié en 1878 ), de médecine et de sciences naturelles ( licencié en 1890 et docteur en 1894 ). En 1890, il rejoint le laboratoire de psychologie physiologique de la Sorbonne, rattaché à l'Ecole pratique des hautes études. Il en devint le directeur adjoint en 1892. En 1892, Théodore Simon, interne de psychiatrie à la colonie de Perray-Vaucluse, le contacte au sujet des enfants anormaux dont il a la charge. Ils débutent une collaboration. En 1895, il donne une série de cours à l'Université de Bucarest en Roumanie. En 1905, à la demande du gouvernement français, Alfred Binet publie une échelle métrique de l'intelligence qu'il a élaborée conjointement avec Théodore Simon. Cette échelle a pour but de mesurer le développement de l'intelligence des enfants en fonction de l'âge. Dans les années suivantes, il proposera des améliorations. Ce travail sera le point de départ de nombreux autres tests, en particulier le QI dont la formule est la suivante : âge mental / âge réel x 100. 
    Ce courant de pensée est vigoureusement critiqué par les spécialistes de la génétique. Ces derniers déplorent que l'intelligence soit réduite à un score alors que le sens originel de l'intelligence recouvre " la faculté de connaître, de comprendre, d'imaginer, d'inventer, l'aptitude à s'adapter à des situations nouvelles, à découvrir des solutions imprévues ". Certes, les individus sont caractérisables à partir d'un certain patrimoine génétique, mais ce qu'ils sont, ils le deviennent en fonction de l'expérience, de l'apprentissage, de l'environnement, les gènes de la folie, du langage et de l'intelligence n'existent pas.
      5.2.  Difficulté d'établir une réelle coordination entre les niveaux d'enseignement.
Pourquoi l'apprenant n'a-t-il pas atteint le seuil de compétences que ses camarades de classe ont pu atteindre ?
      *  Quelles sont ses difficultés d'apprentissage ?
      *  Quelle est sa motivation, quelles sont ses dispositions personnelles à évoluer ?
      *  Quels sont les moyens mis en place pour l'aider à rencontrer ses difficultés ? Nous nous demandons quoi faire une fois que les apprenants sont en échec, alors qu'il faudrait plutôt nous préoccuper de ce qu'il y aurait à faire pour éviter que les apprenants soient en échec, ou mieux encore, permettre aux apprenants d'apprendre et de progreser de façon continue sans avoir à éprouver chaque année, et même plusieurs fois par année, l'angoisse de l'échec.
  Pour gérer la problématique de l'échec scolaire.
      *  Travailler avec les apprenants en difficulté plutôt qu'avec les autres.
      *  Accepter d'être confronté à des apprenants peu gratifiants, différents, indisciplinés, qui n'aiment pas l'école, qui ne sont guère coopératifs, qui font peu de progrès spectaculaires ... cela peut paraître à certains peu valorisant ... et pourtant !!
    Lorsqu'on réfléchit à propos de l'échec scolaire, le système éducatif entier paraît impliqué !! La tendance est de se dire qu'il faudrait tout changer : les programmes, l'évaluation, la formation initiale, la structure des cours, le cloisonnement des cours sans quoi on n'y arrivera pas et il sera impossible de contribuer à la promotion d'une école de la réussite.
    Mais, il n'est pas possible de lutter seul contre l'échec scolaire le travail en équipe et le partenariat en concertation représentent aujourd'hui une nécessité.
    Des recherches ont démontré que l'échec scolaire a notamment pour cause :
      *  L'incohérence des pratiques pédagogiques d'un enseignant à l'autre.
      *  La diversité des exigences et des attentes des professeurs. En effet, ceux-ci sont traversés par des attentes et des représentations d'eux-mêmes et des apprenants. Ils ne sont, en effet, pas neutres sur le plan culturel. Leur parcours professionnel et leur milieu socio-culturel conditionnent fortement leurs attentes et leurs représentations de l'apprenant idéal. Les enseignants valoriseront les apprenants qui s'en rapprochent le plus et dévaloriseront ceux qui s'en éloignent par le biais d'attitudes verbales, gestuelles et écrites rapidement intériorisées. La dévalorisation atteint l'individu de façon intime dans l'image qu'il a de lui-même. Ceci souligne combien les attentes des professeurs peuvent conditionner le comportement scolaire des élèves ( effet pygmalion ).
      *  La diversité des méthodes.
      *  Et ainsi la difficulté des apprenants de comprendre et de décoder les attentes à leur égard.
    Cinq mythes à remettre en question.
    1. Le redoublement permet à l'apprenant en difficulté d'améliorer ses résultats scolaires et de mieux réussir dans le futur.
    Mais le redoublement n'est pas utile puisqu'il fait recommencer à l'apprenant un programme qui, s'il n'était pas réussi dans un premier temps, ne le serait pas davantage plus tard.
    G.B. Jackson - 1975 in " Research Evidence on the Effects of Grade Retention " publie des documents relatifs à 44 recherches originales s'échelonnant de 1929 à 1973 et signale : " les éducateurs qui continuent à utiliser le redoublement le font sans garantie scientifique quant au rendement scolaire et à l'ajustement personnel et social ".
     Shepard and Smith - 1989 in " Flunking Grades : Reserach and Policies on Retention " démontrent que 2 ans après l'année doublée, les résultats des doubleurs sont aussi faibles que les résultats des apprenants faibles qui, eux, avaient été promus, et ce, même si les doubleurs étaient plus âgés que les autres.
    D'après une autre étude faite sur 5000 apprenants à New York, 20 % des apprenants qui redoublent améliorent leurs résultats, 39 % ne présentent pas de changement et 41 % obtiennent des notes inférieures à celles de l'année qui précédait l'année du redoublement. Donc, les effets du redoublement, quand il y en a, ne sont pas persistants.
    2. Le redoublement aide les apprenants immatures.
     On peut se demander si, en mettant les apprenants immatures avec les plus jeunes, on les aide vraiment à acquérir davantage de maturité.
    3. Les cas de redoublement sont peu nombreux : on ne fait doubler que dans des cas exceptionnels.
    Aujourd'hui, selon les indicateurs du département des Statistiques, en Communauté française de Belgique, près de 26,5 % des apprenants terminent l'enseignement primaire et arrivent au secondaire en ayant déjà doublé au moins une fois et plus de 62,8 % des apprenants du secondaire ont au moins un an de retard au terme de leurs études.
    Une étude a été menée sur les " groupes résiduels constitués par les jeunes qui, bien que satisfaisant à l'obligation légale, ne terminent pas la scolarité obligatoire dans des conditions " normales ", soit qu'ils n'obtiennent pas de diplôme, soit qu'ils redoublent et quittent le système de formation avant d'avoir atteint le niveau correspondant à la fin de la scolarité obligatoire ".
    Les conclusions de cette recherche européenne ( voir le site eurydice ) font apparaître qu'entre 1986 et 1987, sur un peu plus de 5 millions de jeunes de 15 et 16 ans, 550.000 environ n'obtenaient pas de diplôme à la fin de la scolarité obligatoire ou ne terminaient pas celle-ci dans des conditions normales. Ceci équivaut à 10 - 12 % d'exclus du système éducatif au terme de la scolarité obligatoire. Il semble donc que chaque année, " dans des pays aussi différents quant à la structure de leurs systèmes éducatifs que l'Allemagne, la France, le Royaume-Uni, l'Espagne et l'Itale, entre 70.000 et 100.000 jeunes sortent de l'appareil éducatif sans aucune qualification professionnelle que ce soit.
 Proportion d'enfants quittant l'école secondaire sans diplôme :
        Belgique : non communiqué.
        Danemark : non communiqué.
        Allemagne : 12 %.
        Grèce : 36 %.
        Espagne : 23 %.
        Irlande : 8 %.
        Italie : 12 %.
        Luxembourg : non communiqué.
        Pays-Bas : 26 %.
        Portugal : 15 %.
        Royaume-Uni : 8 %.
    Au niveau scolaire, la culture de l'excellence se mue aisément en une culture de l'échec. Nombreuses sont les recherches qui montrent que les décisions de redoublement prises par les enseignants ont une part importante d'arbitraire. Confinés dans le microcosme de leur classe et animés par une idéologie de l'excellence, les enseignants ont tendance à calibrer leur enseignement sur les meilleurs apprenants et donc à concevoir des exigences qui dépassent les programmes ; leurs épreuves sont également ajustées au niveau des meilleurs, ce qui les conduit inéluctablement à sous-estimer les compétences des apprenants les plus faibles de leur classe et à donner à leur jugement une valeur absolue alors qu'il faudrait en reconnaître la valeur relative.
    4. Le redoublement améliore l'estime de soi chez l'apprenant en difficulté. L'apprenant qui redouble obtient généralement de bons résultats.
    Mais l'apprenant sait qu'il est normal qu'il réussisse mieux puisqu'il refait les activités de l'année précédente. Le sentiment d'échec vécu est difficile à accepter et est accentué par le fait de devoir l'annoncer à son entourage.
    Des études faites aux U.S.A. mettent en lumière l'incidence négative du redoublement sur les plans scolaire, personnel et social. Le redoublement est considéré par l'apprenant comme un échec personnel et non comme une voie de réussite.
    5. Si l'apprenant est jeune lorsqu'il redouble, il ne sera pas marqué par cette expérience. ( Les adultes y voient même une mesure d'aide !! ).
    Mais l'apprenant y voit plutôt une punition véhiculant l'ennui et les sentiments négatifs si bien que le redoublement accroît les risques de décrochage scolaire.
    Les apprenants qui redoublent présentent un nombre élevé d'absences. Environ 70 % d'entre-eux ont été absents de l'école 11 jours et plus. De plus, 10 % des apprenants qui redoublent auraient été suspendus de l'école au moins une fois.

    Autres pays - autres solutions .
    Redoublement possible ou proscrit ??
    *  Belgique : possible en fin de cycle en primaire, possible chaque année en secondaire inférieur et supérieur.
    *  Luxembourg : possible chaque année en primaire et en secondaire inférieur et supérieur.
    *  Royaume-Uni : promotion automatique en primaire et secondaire inférieur et supérieur.
    *  Danemark : promotion automatique en primaire et secondaire inférieur et supérieur.
    *  Espagne : possible en fin de cycle en primaire, possible chaque année en secondaire inférieur et supérieur.
    *  Finlande : promotion automatique en primaire, promotion automatique en secondaire inférieur et possible chaque année en secondaire supérieur.
    *  France : possible en fin de cycle en primaire, possible chaque année en secondaire inférieur et supérieur.
    *  Grèce : doublement exceptionnel en primaire, possible chaque année en secondaire inférieur et supérieur.
    *  Italie : possible chaque année en primaire et en secondaire inférieur et supérieur.

    *  Irlande :
Promotion automatique en primaire et en secondaire inférieur et supérieur.
    *  Norvège promotion automatique en primaire et en secondaire inférieur et possible chaque année en secondaire supérieur.
    *  Pays-Bas : Possible chaque année en primaire, en secondaire inférieur et supérieur.
    *  Portugal : doublement exceptionnel en primaire, possible chaque année en secondaire inférieur et supérieur.
    *  Allemagne : Possible chaque année en primaire, au secondaire inférieur et supérieur. 
    *  Suéde : promotion automatique en primaire et en secondaire inférieur, possible chaque année en secondaire supérieur.
Suisse : possible chaque année en primaire et secondaire inférieur et supérieur.

    Pourquoi le non - redoublement ?
      1. Arguments scientifiques.
      De nombreuses études universitaires et d'autres mettent en évidence l'inefficacié du redoublement. Le redoublement n'entraîne pas des effets positifs, n'est pas aussi efficace qu'on le souhaiterait et même peut avoir, selon plusieurs auteurs, des effets indésirables ".
      2. Arguments économiques.
    Le coût du redoublement est énorme pour la Société et les parents. Au Québec, on évalue à 505,2 millions de dollars les coûts engendrés par la reprise d'une année et aux USA, on estime le coût d'une reprise d'année à environ 6000 dollars par apprenant dans le budget consacré à l'enseignement. En Communauté française de Belgique, selon les chiffres publiés le 30 janvier 2008 par l'Office des Statistiques, le redoublement a coûté 335 millions d'euros dont 45 pour le primaire et 290 pour le secondaire.
      Dans la Communauté européenne, le coût de l'échec scolaire a fait l'objet d'études dans certains Etats membres. Ainsi, en France l'ensemble des dépenses engagées - de la maternelle à l'université pour les élèves qui ont quitté l'enseignement sans qualification et pour ceux qui ont prolongé leur cursus de formation par des redoublements et ou réorientations - atteint une somme proche des 100 milliards de francs français c'est-à-dire 30 % du budget alloué à l'éducation. En Belgique, une étude publiée par l'IRES estime que l'on réduirait de 10 % les coûts de l'enseignement dans la Communauté française si le redoublement était purement et simplement supprimé.
      Ces estimations illustrent combien le coût élevé de l'échec scolaire pèse de façon dramatique sur la balance financière de certains systèmes éducatifs et reflètent un profond malaise dans les systèmes éducatifs des Etats membres.
      Depuis l'extension de l'obligation scolaire pour tous, l'échec scolaire donc le redoublement s'impose de plus en plus comme un problème de société préoccupant. Les jeunes qui se retrouvent exclus de toute participation sociale ont en effet le plus souvent été victimes de l'échec scolaire à un moment ou l'autre de leur parcours scolaire. Plus que jamais, l'échec scolaire engendre l'échec social, c'est-à-dire la vie précaire, la marginalisation, la dépendance à l'égard des mécanismes d'assistance. La Communauté européenne compte 53 millions de personnes qui sont exclues des bénéfices de la prospérité? C'est dire qu'un peu plus de 15 % de la population européenne se trouve marginalisée sur le plan économique et social ; parmi ces marginaux, on compte une proportion importante de jeunes. Mais il faut aussi savoir que dans les pays de l'OCDE les jeunes de vingt-quatre ans qui disposent d'un niveau de formation de type enseignement supérieur sont trois à quatre fois moins souvent victimes du chômage que ceux qui disposent d'un niveau de formation élémentaire. Les mécanismes générateurs d'exclusion sociale sont complexes. Toutefois, sur le plan individuel, le niveau de formation atteint constitue une donnée majeure qui renvoie directement au droit à l'éducation de tous les citoyens.
      D'autant plus que dans une économie ouverte, la logique exige que l'on dispose d'une main-d'oeuvre qualifiée capable de s'adapter à l'évolution rapide des technologies et de renouveler en permanence ses compétences et connaissances. Donc la compétitivité de la population active est étroitement liée aux possibilités qu'elle a d'acquérir les connaissances théoriques et pratiques appropriées.
      Dès lors, il convient d'enrayer les mécanismes générateurs d'exclusion chez les jeunes et de s'assurer que chacun atteint les connaissances de base et un niveau minimum de formation permettant de trouver un emploi et de participer à la vie sociale des citoyens.
     Ensemble des chômeurs en pourcentage du total des actifs.
        *  Espagne : 22 %.
        *  Irlande : 18 %
        *  Italie : 12 %
        *  Europe : 10 %
        *  Royaume-Uni : 11 %.
        *  France : 11 %.
        *  Danemark : 11 %.
        *  Belgique : 10 %.
        *  Pays-Bas : 8 %.
        *  Allemagne : 5 %.
        *  Portugal : 6 %.
        *  Luxembourg : 3 %.
    Chômage des moins de 25 ans en pourcentage du total des actifs de moins de 25 ans.
        *  Espagne : 37 %.
        *  Irlande : 23 %

        *  Italie : 28 %.

        *  Europe : 19 %.
        *  Royaume-Uni : 16 %.
        *  France ; 23 %.
        *  Danemark : 12 %.
        *  Belgique : 20 %.
        *  Pays-Bas : 14 %.
        *  Allemagne : 5 %.
        *  Portugal : 12 %.
        *  Luxembourg : 7 %.
     3. Arguments géographiques et culturels.
    Bon nombre de pays européens n'usent pas du redoublement et ne " produisent "pas moins de personnel qualifié. On sait, aujourd'hui, qu'un certain nombre de systèmes éducatifs ont opté pour l'abolition du doublement ou, plus justement, pour la promotion automatique. Les études internationales montrent que ces pays se caractérisent par des rendements scolaires et la production d'une élite tout à fait appréciables. On doit donc rejeter avec fermeté l'affirmation selon laquelle la suppression de l'échec et, en particulier, du doublement conduirait à une baisse de la qualité de l'enseignement.
    4. Arguments sociologiques.
    Les décisions de redoublement dans notre système scolaire restent subjectives, aléatoires et injustes. Dans certains milieux, on reproche même aux collègues leur manque de rigueur lorsqu'ils donnent une chance à l'apprenant en difficulté en autorisant son passage à la classe supérieure. La crainte d'être qualifiés enseignants trop permissifs peut influer sur les décisions relatives au passage ou au redoublement.
    5. Arguments psychologiques.
    Le redoublement entame durablement, sinon définitivement, l'estime de soi, le goût d'apprendre, l'intérêt de l'apprenant pour l'école, le sentiment d'être capable et de pouvoir grandir c'est-à-dire que le redoublement risque d'avoir un effet néfaste sur le développement social et émotif de l'apprenant. En effet, tout échec, chez qui que ce soit, et de quelque type qu'il soit, constitue presque par définition, une " atteinte de l'image de soi ". Dès lors, l'apprenant peut développer et utiliser les "mécanismes de défense " suivants : le refoulement, la régression, le déplacement, la compensation fantasmatique, la dénégation, l'identification à l'agresseur, la projection sur autrui, l'inhibition, l'isolation et le déni.
    Y. Brais - 1991 et 1994 - in " Retard scolaire au primaire et risque d'abandon au secondaire " et in " Le classement des élèves à l'école primaire " donne des conclusions inquiétantes : " les doubleurs du primaire présentent un risque nettement plus élevé d'abandon scolaire que les autres élèves ; plus l'élève a redoublé tôt, plus il risque d'abandonner ses études ; les doubleurs de 1ère primaire forment le peloton présentant le taux de risque le plus élevé ".
    6. Arguments pédagogiques.
    Il est crucial de rappeler l'impressionnante quantité de recherches de qualité portant sur les effets du redoublement. Leurs conclusions sont très largement convergentes : il est exceptionnel que le doublement permette à l'élève faible de " se remettre en selle " . Lorsqu'on étudie l'évolution scolaire d'élèves faibles qu'on fait doubler, on observe bien entendu une amélioration de leurs performances d'une année à l'autre. Mais les études montrent de manière irréfutable que des élèves tout aussi faibles qui sont promus progressent davantage.
    Le redoublement est inconcevable dans une perspective de développement continu de compétences et de pratiques de pédagogie différenciée où l'apprenant est acteur. C'est une mesure " grossière " de remédiation.
    On oublie trop souvent que l'échec scolaire donc le redoublement se décrète au terme d'une évaluation, qu'il est avant tout le résultat du jugement qui est porté par les enseignants sur les performances des élèves, d'une décision qui est prise par des adultes à propos du devenir scolaire des jeunes. Il est par conséquent logique de considérer que la fréquence des doublements est fonction - au moins en partie - des caractéristiques et façons de faire de ceux qui prennent la décision. Or, les nombreuses études menées sur les pratiques d'évaluation des enseignants font apparaître de multiples et importants biais de subjectivité ainsi que de fréquents dépassements des programmes. En matière d'évaluation, l'arbitraire semble régner en maître. Pour faire bref, on dira que l'échec scolaire donc le doublement dépend essentiellement de la classe que les apprenants fréquentent et des normes d'exigences de ceux qui les ont évalués.

    Conclusion provisoire.
    Chercheurs, organismes de recherche et l'UNESCO répondent par la négative à la question suivante : " est-il réellement efficace de faire redoubler un élève en difficulté ? " si bien que la possibilité de revoir le programme de l'année où les défaillances se sont manifestées est désuète au Japon et dans les pays scandinaves. Ainsi, Lorrie Shepard, Marcel Crahay, Carnegie, Council on adolescent development, l'Association Internationale pour l'Evaluation du Rendement Scolaire et l'UNESCO, dans plus de 200 recherches, affirment que les effets négatifs du redoublement surpassent largement les bénéfices qu'on peut en attendre. Sur la base de ces travaux, les Etats membres de la Communauté européenne tendent à limiter les possibilités de redoublement. Les pays qui pratiquent la promotion automatique peuvent aussi se prévaloir des résultats des études internationales du rendement scolaire et mettre en évidence le fait que les résultats obtenus par leur population scolaire sont généralement supérieurs à la moyenne internationale. Ainsi, si l'on prend pour exemple la dernière étude internationale consacrée aux compétences en lecture des élèves de 9 à 14 ans, on trouve, parmi les pays les plus performants, la plupart des pays qui ont opté pour la promotion automatique. Les résultats de ces comparaisons internationales permettent, toutefois, de réfuter la croyance selon laquelle des taux élevés d'échec scolaire seraient le prix à payer pour un enseignement de qualité.
    Lorrie Shepard est professeur émérite et doyen de la faculté de l'Education à l'Université du Colorado à Boulder. Sa recherche se concentre sur la psychométrie et sur l'utilisation et l'abus des tests psychométriques en milieu scolaire. Ses études ont porté aussi sur le redoublement et la mesure en éducation.
Lorrie Shepard
Lorrie Shepard a été Présidente de l'American Educational Research Association et Présidente du Conseil national de la " Mesure en éducation ". Elue à l'Académie nationale de l'Education en 1992, elle en est devenue la Présidente de 2005 à 2009. Actuellement, elle est membre du Conseil d'Etat du Colorado qui traite de l'efficacité de l'enseignement et de l'amélioration des conditions d'apprentissage des élèves. Elle a reçu récemment le prix Distinguished Career du Conseil national de la " Mesure en Education ".

    Marcel Crahay est Professeur de pédagogie expérimentale et d'analyse des processus d'enseignement à l'Université de Liège (1994) dans laquelle il a succédé au Professeur Gilbert De Landsheere. IL est actuellement Professeur et responsable de l'unité de recherche développement, apprentissage et intervention en situation scolaire à la Faculté de Psychologie et de Sciences de l'éducation de l'Université de Genève ( 2007 ).
Chercheur belge travailant désormais à Genève, Marcel Crahay est l'un des plus fins connaisseurs des systèmes d'éducation et des paramètres qui jouent dans la réussite des élèves. Ses ouvrages " L'école peut-elle être juste et efficace " et " Peut-on lutter contre l'échec scolaire " sont des mines pour comprendre ce qui peut rendre l'école inégalitaire, malgré les déclarations de bonnes intentions. Tous ses travaux portent sur l'échec scolaire, les difficultés d'apprentissage en situation scolaire ainsi que sur les croyances des enseignants eu égard au développement, à l'intelligence, à l'apprentissage, au redoublement et aux pratiques d'enseignement.

    Inefficace, le redoublement est souvent aussi le résultat d'une décision subjective de l'enseignant mais plus grave encore à nos yeux : il est aujourd'hui démontré que le redoublement affecte la confiance qu'à l'élève en ses capacités d'apprentissage et le préjudice est d'autant plus grave que les enseignants, les parents et les condisciples imputent les problèmes scolaires aux capacités intellectuelles de l'élève et ont de l'intelligence une conception innéiste. Le fatalisme et la démission sont au bout de ce processus. En définitive, le message de la recherche est clair : le redoublement est le plus souvent préjudiciable au développement de l'apprenant.
    Ainsi donc, aujourd'hui, le non-redoublement est sur le point de s'inscrire dans notre système scolaire en tant qu'imposition légale au travers de deux décrets : " Ecole de la réussite de 1995 " et " décret Missions de 1997 ".
    Cette interdiction entraîne la nécessité de trouver d'autres stratégies et d'autres modes de fonctionnement c'est-à-dire donner une place à l'analyse des pratiques, à la créativité à condition toutefois que les enseignants acceptent de remettre en cause leurs représentations et leurs pratiques d'évaluation. Bref, la solution peut venir de l'école si celle-ci accepte de se considérer comme l'une des sources de l'échec scolaire.
  L'évaluation des apprenants est affaire délicate et les biais dont peuvent être victimes les enseignants sont aujourd'hui clairement identifiés. le plus important est connu sous le nom d'effet Posthumus : quelle que soit la distribution des compétences au début de l'année scolaire, la distribution des notes en fin d'année épouse grosso modo une forme gaussienne ( allure de la courbe normale ). Voir par ailleurs sur le blog la pédagogie du " tiers perdu " de Philippe Meirieu. En conséquence, deux élèves moyens appartenant à deux classes différentes peuvent obtenir des résultats différents aux examens organisés par leurs enseignants respectifs. Celui qui fréquente une classe dont la majorité des élèves est faible aura probablement la chance d'être sur-évalué, voire même d'être classé parmi les meilleurs élèves de la classe. Quant à l'autre, s'il fréquente une classe où la majorité de ses condisciples de classe sont plus forts que lui, il risque fort d'être sous-évalué, voire même d'être jugé par l'enseignant trop faible pour être promu.
    Plus fondamentalement, on peut craindre que les enseignants pratiquent une évaluation normative là où il faudrait une évaluation centrée sur les objectifs. Il est vrai que, très souvent, la performance d'un individu est jugée par référence à celle d'autrui. Cet usage s'est propagé et est devenu le bon usage? Ces pratiques d'évaluation peuvent être considérées comme une manifestation de la culture de l'excellence qui caractérise le fonctionnement des écoles ... mais est-ce bien ce que l'on demande à une école obligatoire ?
    Les partisans des pédagogies de la réussite prennent le contre-pied de cette conception. Pour eux, la mission de l'école n'est pas de fabriquer des hiérarchies d'excellence, mais de susciter un maximum d'apprentissages chez un maximum d'apprenants. L'évaluation sommative devra donc être à référence critérielle, c'est-à-dire devra situer l'apprenant par rapport aux compétences à maîtriser. Plus important encore, il s'agira de faire jouer à l'évaluation une fonction régulatrice. Celle-ci comprendra idéalement deux aspects :
      *  Un aspect de feedback permettant à l'apprenant de situer le résultat de son apprentissage par rapport aux objectifs à atteindre.
      * Un aspect de guidance permettant l'ajustement ou la réorientation de l'enseignement dans une direction plus appropriée à la maîtrise des compétences visées.
   Le recours aux épreuves standardisées et à l'évaluation externe constitue assurément un moyen de juguler les dérives de l'évaluation locale. En effet, l'évaluation externe offre aux enseignants un moyen de situer le niveau de compétence de leurs apprenants par rapport à des seuils de compétence définis au niveau de la Communauté française et de diagnostiquer d'éventuelles lacunes dans leurs connaissances. Si les plus faibles de la classe maîtrisent les compétences minimales, l'enseignant peut s'en trouver rassuré et écarter l'idée de redoublement. Si la majorité des apprenants montrent des lacunes spécifiques, l'enseignant sait où il doit porter ses efforts. En définitive, les enseignants peuvent apprécier le niveau de compétence de leurs apprenants en utilisant une référence bien plus large que le microcosme de la classe.
    Mais de nombreux freins continuent d'exister :
        1. La logique de la classe.
        2. La logique matière.
        3. La peur du changement. Ajoutons simplement le fait que la plupart des enseignants sont convaincus du caractère bénéfique du redoublement et on disposera de l'ensemble des éléments permettant de cerner le coeur de la problématique : pourquoi les enseignants lutteraient-ils contre une réalité qu'ils jugent légitime ( le bon prof a des échecs ), nécessaire ( les élèves ne travaillent pas sans la menace de l'échec ) et utile ( sa conséquence - le doublement permet aux élèves faibles de se remettre en selle ). C'est donc contre les enseignants eux-mêmes et, plus exactement, contre leurs représentations qu'il faut lutter si l'on veut vaincre l'échec scolaire. Il faut, autrement dit, échapper à une analyse qui se concentrerait sur des éléments externes aux enseignants pour les amener à examiner de façon critique leurs convictions et leurs pratiques.
        4. Le jugement des enseignants entre-eux. Diverses enquêtes montrent que la majorité des enseignants de chez nous mais aussi d'ailleurs doutent que les innovations pédagogiques puissent vraiment résoudre le problème. Pour eux, la cause des échecs donc du redoublement est ailleurs : elle se situe au niveau des apprenants ( manquant de maturité, mauvaise attitude de travail, inaptitude fondamentale, ... ). ou au niveau des familles ( manque de soutien, démission, ... ). Dans ce cas, une interrogation semble s'imposer : l'école peut-elle faire partie de la solution si elle refuse de se considérer comme un des éléments qui engendrent le redoublement ?
        5. La pression des pouvoirs organisateurs.
        6. Le statut de l'erreur.
    Cependant des pistes existent et méritent d'être analysées au sein des équipes éducatives :
     1. Des adultes en projet qui :
        *  Construisent le sens de cette nouvelle école et travaillent en équipe.
        *  Pilotent le projet avec la direction de l'école.
        *  Explicitent leurs différences et construisent leur cohésion.
        *  Se donnent du temps, des espaces et des moyens.
        * Associent tous les partenaires de l'école.
        *  Se solidarisent en entité.
        *  Osent le changement systémique tout en étant centré sur l'apprenant.
        *  Modifient leur façon d'envisager les matières, les disciplines.
      2. S'engager sur la voie de l'évaluation formative en la distinguant des bilans et des contrôles successifs.
       3. Développer une conscience accrue sans le recours à tous les outils et méthodes précis.
       4. Se concerter au bénéfice de l'organisation du travail des apprenants et du partage de leur évaluation formative en réfléchissant à ceci :
    Postulat de Burns :
      Il n'y a pas deux apprenants qui progressent à la même vitesse.
      Il n'y a pas deux apprenants qui sont prêts à apprendre en même temps.
      Il n'y a pas deux apprenants qui utilisent les mêmes techniques d'étude.
      Il n'y a pas deux apprenants qui résolvent les problèmes exactement de la même manière.
      Il n'y a pas deux apprenants qui possèdent le même répertoire de comportements.
      Il n'y a pas deux apprenants qui possèdent le même profil d'intérêt.
      Il n'y a pas deux apprenants qui sont motivés de la même manière pour atteindre les mêmes objectifs.
    5. Partager, réfléchir, élaborer les activités et leur organisation en se concertant régulièrement en cycle.
    6. Partager ses observations à propos des apprenants avec toute l'éthique professionnelle requise et en se méfiant de l'effet Pygmalion.
    L'effet Pygmalion. Pygmalion, légendaire sculpteur grec, tomba amoureux d'une de ses oeuvres, une statue au corps de femme. En retour, la sculpture s'anima et devint le femme idéale dont rêvait le créateur. Tout comme le sculpteur aux doigts magiques, les enseignants ont le pouvoir d'amorcer chez leurs élèves des conduites conformes à leurs attentes. On parle alors d'effet Pygmalion. Le phénomène a été décrit pour la première fois par Rosenthal et Jacobson, en 1968, dans l'ouvrage " Pygmalion à l'école ". Les auteurs y relatent des expériences conduites à Oak School, aux Etats-Unis, sur 650 enfants. Un test proposé en début d'année scolaire permet de déterminer le Q.I. des élèves et de dégager, dans chaque classe, un groupe de 20 % d'enfants susceptibles de faire des progrès significatifs. En fin d'année, nouveau test qui révèle des résultats exceptionnels chez les élèves désignés lors du premier test. Rien d'anormal, si ce n'est que les listes des enfants aux aptitudes particulières, fournies aux enseignants après le premier test et avant leur rencontre avec les élèves, sont totalement arbitraires, elles ont été faites par tirage au sort. La différence entre le groupe d'enfants particuliers et les autres n'existait que dans la tête des enseignants. Croire aux capacités intellectuelles des élèves avait créé des conduites propres à les rendre intelligents. ( Extrait du Monde de l'Education N° 314 de mai 2003).
   Une illustration de l'effet Pygmalion : une recherche française a été menée au cours des années 90 auprès de professeurs de physique ( hommes et femmes ) de collège : les mêmes copies d'élèves de 4ème leur ont été soumises avec soit un prénom de fille, soit un prénom de garçon déterminé de manière tout à fait aléatoire. On constate que lorsque la copie est bonne, elle obtient une meilleure note si elle porte un prénom de garçon. En revanche, quand la copie est médiocre, la note est moins sévère si elle porte un prénom de fille. A noter également que les enseignants femmes et hommes, se conduisent de la même manière dans leur mode de notation.
    Les attentes des enseignant(e)s par rapport à leurs élèves tendent à fonctionner comme des " prédictions auto-réalisatrices ". Ces attentes diffèrent selon le sexe et en particulier en ce qui concerne les matières enseignées. Les connotations masculines des mathématiques et féminines de la lecture et de l'écriture alimentent la conviction de bien des enseignant(e)s que les garçons sont plus capables de réussir dans les disciplines scientifiques et que les filles sont plus douées dans les matières littéraires. A cela s'ajoute le fait que les mathématiques sont considérées comme plus utiles pour les garçons que pour les filles en termes d'études et de carrières futures, et que la majorité des enseignant(e)s n'encourage pas leurs élèves à faire des choix non conformes à leur sexe. Une attitude moins réactionnaire que réaliste car ces enseignant(e)s anticipent les difficultés réelles que rencontreront les filles dans des métiers exercés en majorité par des hommes et hésitent à encourager les garçons à choisir des options moins valorisées socialement. ( Extrait de " Ensemble offrons un avenir à l'égalité " édité par le Ministère de la Communauté française en 2003 ).
    Durée de la scolarité obligatoire dans la Communauté européenne.
      *  Belgique : de 6 à 18 ans avec possibilité à temps partiel dès 15 ans.
      *  Danemark : de 7 à 16 ans.
      *  Allemagne : de 6 à 18 ans avec possibilité à temps partiel dès 15 ans.
      *  Espagne : de 6 à 16 ans.
      *  France : de 6 à 16 ans.
      * Italie : de 6 à 14 ans.
      *  Luxembourg : de 4 à 15 ans.
      *  Pays-Bas : de 5 à 18 ans avec possibilité de temps partiel dès 16 ans.
      *  Portugal : de 6 à 15 ans.
      *  Angleterre : de 5 à 16 ans.
      *  Irlande : de 4 à 16 ans.
      *  Ecosse : de 5 à 16 ans.
    Quelques réflexions d'adolescent(e)s qui méritent, me semble-t-il, une attention particulière de notre part.
      * Mes yeux n'ont pas vu le monde comme vous ; laissez-moi l'explorer en toute sécurité, mais sans interdit inutile.
      * Il y aura toujours des choses à faire à l'école, mais moi je ne suis jeune que pour quelques années. Prenez le temps de m'expliquer les choses, avec patience et bonne volonté. Ce monde semble si merveilleux.
      * Je suis fragile, même si je ne le montre pas. Soyez sensible à mes besoins, à ce que je ressens. Ne vous moquez pas de moi sans arrêt. Traitez-moi comme vous aimeriez être traité ou, mieux, comme vous auriez aimé être traité quand vous aviez mon âge.
      * J'ai besoin de vos encouragements pour grandir. Mettez la pédale douce pour les critiques. Souvenez-vous : " vous pouvez critiquer ce que je vais sans me critiquer moi ".
      * Donnez-moi le droit de prendre des décisions moi-même. Autorisez-moi à expérimenter l'échec, pour que j'apprenne de mes erreurs. De cette façon, je serai prêt à prendre plus tard les décisions que la vie me demandera de prendre.
      * S'il vous plaît, cessez de me comparer. Je suis unique. Si vous avez des attentes trop fortes pour moi, je ne me sentirai pas à la hauteur, et cela minera ma confiance en moi. Je sais que c'est difficile, mais ne me comparez à personne.
    Quelques déclencheurs qui susciteront sans doute une réflexion active au sein des groupes d'enseignants dans les établissements scolaires.
    1. Pensez à la tragédie qui se prépare lorsqu'un enfant grandit au son d'une série de refrains caustiques tels que : " Nous savons que tu peux faire mieux " ou " Il va réussir quand il décidera de faire un effort " ou encore " Elle n'a pas la bonne attitude ", surtout lorsque ces affirmations ne sont que faussetés. Eles sous-entendent que l'enfant est en quelque sorte immoral sur le plan scolaire, coupable au premier degré de son propre malheur !! Oui, ils pourraient faire mieux, mais si et seulement si les adultes qui les entourent les comprennent mieux et les aident à réussir.
    2. Qui aime s'entendre couvrir de reproches tout en gardant le sourire ? Pourtant, certains jugements sont nécessaires. Si la Société laissait tout faire, si le monde éducatif ne tentait pas de redresser la barre lorsque c'est nécessaire, alors la fin de notre civilisation serait sans doute très proche, voire imminente. Le tout est de bien faire passer ces jugements utiles, de n'exprimer que ceux qui sont nécessaires.
    Pour en savoir plus et ou autrement.
Brais, Y., Retard scolaire au primaire et risque d'abandon scolaire au secondaire, Québec, Ministère de l'Education, Direction générale de la recherche, 1991.
Jackson, G.B., The Research Evidence on the Effects on Grade Retention, Review of Education Research N° 45, 1975.
Holmes and Matthews, The Effects of Nonpromotion on Elementary and Junior School Pupils : a Meta-Analysis, Review of Educational Research N° 54, 1984.
Shepard and Smith, Flunking Grades : Research and Policies on Retention, London, Falmer Press, 1989.
Perrenoud, Philippe, La fabrication de l'excellence scolaire, Genève, Droz, 1995.
Meirieu, Philippe, Apprendre, ... oui mais comment ?, Paris, ESF, 1992.
Jacquard, Albert, Eloge de la différence, Paris, Seuil, 1978.
Jacquard, Albert, L'intelligence est-elle héréditaire, Paris, ESF, 1981.
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                                    Yvan Keuwez
               Licencié-agrégé en Sciences de l'Education.

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