dimanche 25 septembre 2011

En pédagogie

En pédagogie, il n'y a pas d'idée franchement mauvaise. Ce qui est franchement mauvais, c'est de ne pas avoir d'idées du tout. Mais ni les idées, ni le bon sens ne suffisent !!!
    Alors, la pédagogie c'est quoi ? C'est la science de l'éducation des enfants, des adolescents et plus particulièrement la science de l'enseignement. C'est toute activité déployée par une personne pour développer des apprentissages précis chez autrui. Ainsi, la pédagogie est une action et cette action vise à provoquer des effets précis d'apprentissage.
    L'objectif poursuivi ici est de conduire le lecteur vers une pratique réflexive dans son métier d'enseignant au quotidien pour tout simplement améliorer le quotidien des étudiants. ( Référence bibliographique : Perrenoud, Philippe, Développer la pratique réflexive dans le métier d'enseignant, Paris, ESF, 2008.).
Philippe Perrenoud, sociologue, est né en 1944 en Suisse. Docteur en
sociologie et anthropologie, il est professeur ordinaire à l'Université de Genève, dans le champ du curriculum, des pratiques pédagogiques et des institutions de formation. Il co-anime le Laboratoire de recherche sur l'innovation en formation et en éducation. Ses travaux sur la fabrication des inégalités et de l'échec scolaire l'ont conduit à s'intéresser au métier d'élève, aux pratiques pédagogiques, à la formation des enseignants, au curriculum, au fonctionnement des établissements scolaires, aux transformations du système éducatif et aux politiques de l'éducation. Outre de nombreux articles, il a publié une quinzaine de livres.
     C'est au travers de textes d'auteurs, de réflexions personnelles, de critiques constructives et de différents outils que des pistes se dégageront permettant alors de jeter un autre regard sur les apprenants.
     Une première phrase pour entamer la réflexion : " Les adolescents qui ont des besoins extraordinaires ont besoin de retrouver sur leur route des gens extraordinaires. YK ".
    Mais quels sont donc ces besoins si extraordinaires, si fondamentaux des adolescents ? .... Un premier outil vient nous aider à les découvrir : la hiérarchie des besoins de Maslow ( Référence bibliographique : Maslow, Abraham, Vers une psychologie de l'être, Paris, Fayard, 1972 ).
Abraham Maslow (1908 - 1970) est le psychologue américain considéré 
Abraham maslow.jpg
comme la figure de proue de l'approche humaniste. Il est surtout connu pour son explication de la motivation par la hiérarchie des besoins. Défenseur d'une psychologie de l'individu sain et non plus exclusivement du malade, basée sur le rapprochement entre la psychanalyse et une profonde philosophie existentielle, il nous invite donc plutôt à considérer l'humain du point de vue de son humanité, de son potentiel et non de ce qui pourrait être mauvais en lui. Il a enseigné dans plusieurs universités et a présidé l'American Psychological Association à la fin de sa vie. Il a écrit de nombreux ouvrages dont un traduit en Français dont vous avez les références ci-dessus.
   Cependant, cette échelle des besoins est hiérarchisée c'est-à-dire qu'il est difficile voire impossible de combler le besoin immédiatement supérieur si l'inférieur n'est pas rencontré. Entreprenons ensemble l'escalade de cette pyramide pour mieux nous faire comprendre :
Besoins physiologiques : manger, boire, ......... il devient compliqué de travailler intellectuellement ou manuellement quand on est tiraillé par une faim tenace. Un proverbe vieux comme les chemins illustre ce propos : " Ventre creux n'a pas d'oreilles ". Aujourd'hui, en 2009, dans certaines villes, dans certains quartiers, on a bien compris cela. Donc, la première chose que les étudiants font en arrivant à l'établissement scolaire c'est ..... déjeuner.
Besoins de sécurité : si l'adolescent n'a pas été bien accueilli dans sa classe, son école comment peut-on espérer qu'il y travaille bien ? ....
Si l'adolescent a dû déposer son anorak (de marque) en dehors de la classe et qu'il n'est pas certain de le retrouver intact à la fin du cours, comment peut-on espérer qu'il produise au cours un travail intéressant ? ....
Si l'adolescent sait qu'il sera ennuyé (ou plus encore) pendant les récréations, comment peut-on attendre de cet apprenant un travail performant ? ....
Maintenant, un exemple à ne pas réaliser car vous perdriez à coup sûr des sous ... un soir, vous êtes au restaurant en charmante compagnie. A un certain moment les questions suivantes effleurent votre esprit : "Ma voiture est-elle encore là ?", "Est-elle intacte ?", Comment vais-je la retrouver ?" ... il y a gros à parier que vous quittiez la table, non ......
    Si les besoins de sécurité ne sont pas rencontrés, il ne sera pas possible à l'apprenant de s'intégrer parfaitement au sein de sa classe.
    Chacun peut maintenant réfléchir et trouver les exemples qui lui semblent pertinents pour chacun des autres niveaux. 
    Traduits en termes de "didactique" cela pourrait donner ceci ... didactique de la sécurisation - de la participation - de la réussite ". Je laisse à votre réflexion personnelle les réponses à la question suivante : "Dans ma classe, je sécurise qui par rapport à qui, à quoi et comment ?".
    Dans cette optique capitale de "sécurisation", la première rencontre, le premier contact avec un groupe est primordial (Référence bibliographique : Dupont, Pol, La dynamique de la classe, Paris, Puf, 1982). Et pour alimenter la réflexion un déclencheur choisi volontairement en dehors de la pédagogie pour, encore une fois, souligner l'importance de ce moment : "Les premiers contacts sont très importants car ils déterminent en grande partie vos relations futures avec le groupe. Il est donc primordial de soigner cette première séance. Pour les nouveaux, c'est le moment des présentations et de la découverte de vos modes de fonctionnement.     ( Ecole des entraîneurs de Paris).
    Pol  Dupont ( 1941 - ....... ). Instituteur, titulaire d'une licence en sciences pédagogiques et docteur en sciences de l'éducation (Paris 5 - Sorbonne), Pol Dupont a enseigné au primaire, secondaire et supérieur pédagogique. Il a été doyen de la faculté de Psychopédagogie à l'Université de Mons Hainaut où il a créé , en 1984, et dirigé l'Institut d'Administration Scolaire (INAS). Il a aussi été responsable de la formation des maîtres. Il a assuré des cours à l'Université Louis-Pasteur à Strasbourg et à l'Université Libre de Bruxelles. Ses disciplines de référence étaient : l'administration scolaire, la méthodologie et la didactique, la formation des maîtres.
Mais qui sont ces gens extraordinaires .... !!! 
    Aujourd'hui la pédagogie.
    Deux puissants " moteurs " permettent à l'être humain de fonctionner : " le coeur (aspect Affectif) et la raison (aspect Cognitif) ". Selon l'ordre d'importance que vous attribuerez à ces deux notions dans votre vie au quotidien, vous serez, à n'en pas douter, deux enseignants différents. 
    Dans ce même ordre d'idée, il est bon aussi de savoir que toute conduite humaine, toute action est toujours subordonnée à un ensemble de croyances. La pédagogie n'échappe pas à la règle. C'est une action complexe fédérée par des valeurs (l'idée que le pédagogue se fait de la société, de l'Homme et de leur rapport mutuel) et par des hypothèses relatives au développement des individus, à leur manière de se construire et de se projeter dans une vie sociale harmonieuse. Ceci a donné naissance aux différents types de pédagogie.
    La connaissance n'est pas seulement transmise par l'enseignant aux apprenants, elle est transformée dans l'esprit de ces derniers et est le résultat d'une médiation culturelle et sociale. (David Sousa). (Référence bibliographique : Sousa, David, Un cerveau pour apprendre, Montréal, Chenelière, 2002).
    Le Docteur David A. Sousa est un consultant en éducation qui oeuvre sur le plan international. Il détient un baccalauréat es sciences en chimie obtenu au Massachusetts College, une maîtrise es arts en enseignement des Sciences décroché à Harvard et un doctorat obtenu à l'Université Rutgers. Sousa a fait de nombreuses présentations lors de conventions nationales en éducation et a tenu des ateliers de travail sur le cerveau et en sciences de l'éducation dans des centaines de districts scolaires et de nombreux collèges et universités aux Etats Unis, au Canada, en Europe et en Asie. Son expérience couvre tous les niveaux d'enseignement. Il a enseigné les Sciences aux premier et deuxième cycles du secondaire. Il est ensuite devenu le directeur général des Ecoles publiques du New Jersey. Il a été professeur auxiliaire à l'Université de Seton Hall et chargé de cours à l'Université Rutgers. Sousa a publié des ouvrages scientifiques et de nombreux articles dans des revues d'éducaton traitant du développement personnel, de l'éducation aux Sciences et traitant surtout de la recherche sur le cerveau, sur les sciences de l'éducation et sur la formation du personnel scolaire. Il a été président du Conseil national de perfectionnement du personnel en 1992.
    Il écrivit notamment quatre ouvrages qui ont un retentissement mondial et qui sont mes livres de chevet :
        * Un cerveau pour apprendre.
        * Un cerveau pour apprendre ... à lire.
        * Un cerveau pour apprendre les ... mathématiques.
        * Un cerveau pour apprendre ... différemment.
    Aujourd'hui, grâce à l'utilisation des scanners tomographiques, IRM et IRMF, les chercheurs peuvent déterminer quelles parties du cerveau sont impliquées dans des tâches spécifiques et lesquelles sont inactives. La magnétoencéphalographie, technologie non invasive, peut produire 4000 mesures magnétiques du cerveau à la seconde et a permis ainsi de mettre en exergue une découverte fondamentale ... je ne résiste pas au plaisir que je ressens en vous livrant un extrait de l'ouvrage de Sousa : " Les enseignants souhaitent que leurs apprenants se souviennent en permanence de ce qu'ils leur ont enseigné. Il est donc intriguant de constater que les deux structures du cerveau principalement responsables de la mémorisation à long terme se situent dans le système émotionnel qui, comme chacun le sait, gère tout l'Affectif ".
    Donc, ce que l'on pressentait hier à savoir la primauté de la qualité de la relation enseignant - enseigné dans le processus d'apprentissage se vérifie aujourd'hui de manière rigoureusement scientifique. D'autres chercheurs avaient déjà traduit ceci de manière beaucoup plus directe et plus percutante dans un ouvrage au titre très révélateur. ( Référence bibliographique : Aspy et Roebuck, On n'apprend pas d'un prof qu'on n'aime pas, Bruxelles, E.P.E., 1990 ).
    Pour que nous soyons vraiment extraordinaires, de nombreux facteurs quasi incontournables méritent une réflexion approfondie en équipe. Cependant, il est intéressant de savoir que : " Je n'ai pas de solution miracle : mon objectif, ce n'est pas de construire la manière d'enseigner de demain, c'est de montrer qu'elle ne doit pas ressembler à celle d'aujourd'hui. YK ".
 Pourquoi changer ?
    Qu'est-ce qui justifierait le fait que je prenne des risques ? Alors que je perçois que les pratiques d'autrefois ont été efficaces et que je ne vois pas encore pourquoi elles ne le seraient plus ?
    N'ai-je pas fait de solides apprentissages ? Pourquoi changer ?
    D'abord avec des mots simples, des mots de tous les jours : " Un adolescent de 1995 et un adolescent de 2010 n'ont plus rien à voir l'un avec l'autre .... s'ils se rencontraient, ce serait comme deux étrangers l'un par rapport à l'autre ".
    Ensuite, de manière un peu plus approfondie :
1.  Le profil culturel des apprenants d'aujourdhui est bien différent de celui des apprenants d'hier ( à découvrir ci-après).
2.  La conjoncture sociale appelle un changement en profondeur.
3.  Les nouvelles découvertes sur le fonctionnement de la pensée modifient notre conception de l'apprentissage.
4.  Davantage d'apprenants sont de moins en moins motivés, et ce, de plus en plus tôt.
    In fine, de manière un peu plus poétique mais aussi efficace : le marché du travail du troisième millénaire ne cherchera pas des gens pouvant effectuer un travail répétitif, incapables de prendre des initiatives et sans trop d'autonomie. C'EST LE CONTRAIRE, me semble-t-il ; on recherchera des personnes autonomes et énergiques, capables de solutionner des problèmes et capables de travailler sous une supervision minimale tout en accomplissant les tâches demandées. Sur le vaste océan de l'éducation flottent plusieurs paradigmes. Les divers courants peuvent causer des collisions en haute mer comme celle éprouvée par le Titanic et l'iceberg en plein milieu de l'Atlantique. Les paradigmes de la pédagogie actualisante et ceux de l'évaluation traditionnelle qui sont divergents pourraient entrer en collision. Si certaines modifications sont apportées aux paradigmes de l'évaluation, les deux pourront se promener main dans la main sur le pont du paquebot de la pédagogie actualisante et NOS APPRENANTS POURRONT PARTIR DE NOS ECOLES AVEC UN C.V. ET NON PAS UNE NOTE.
  Quel est donc le profil des apprenants d'aujourd'hui ?
Leurs sources de connaissances sont nombreuses et variées; les lieux de formation ne sont plus les seuls endroits où les apprenants peuvent acquérir des connaissances.
Leurs modes d'accès à la connaissance se sont transformés; ils sont plus sensibles au monde de l'image et du son qu'au monde de l'écrit.
Ils possèdent davantage de connaissances et dans des domaines de plus en plus variés; ce qu'ils ont gagné en extension, ils semblent l'avoir perdu en profondeur. Il s'agit d'un savoir en miettes, non intégré et non hiérarchisé.
Ils ne traitent pas l'information, mais ils la consomment. Ils reçoivent plus de stimuli, mais moins de médiation.
Ils veulent que l'école soit un lieu marqué par une réelle communication, où ils peuvent être reconnus tels qu'ils sont et non tels que l'on voudrait qu'ils soient, et où ils peuvent exprimer leurs émotions dans leurs mots et raconter leurs expériences de vie.
Ils recherchent des adultes accueillants, authentiques.
L'importance ou la valeur accordée aux études est bien relative; elle est en concurrence avec leur vie sociale, affective, leurs loisirs et souvent leur travail rémunéré.
Ils ont de la difficulté à se projeter dans un avenir incertain.
Ils conjuguent leur vie au présent. A quoi ça sert ? Cela me donne quoi aujourd'hui ? Ils sont à la recherche de sens.
Ils ont terndance, plus tôt qu'autrefois, à s'affirmer, à prendre leurs distances par rapport au monde des adultes et à se différencier.
Ils accordent beaucoup d'importance à l'amour, l'amitié, aux relations interpersonnelles.
Leurs valeurs sont un mélange parfois hétérogène et contradictoire de valeurs nouvelles et de valeurs traditionnelles.
Ils ont des habitudes de vie différentes de celles de leurs aînés quant au sommeil, à l'usage du tabac et de l'alcool, à la consommation de drogues, ... etc ...
    Après ces quelques généralités ou peut-être pour certains banalités, il vient quand même une réflexion intéressante à tenir soit individuellement soit en groupe au sein de son établissement scolaire au départ de la question suivante : " Mes pratiques pédagogiques en salle de classe conviennent-elles au profil des apprenants ? "
    Mais peut-être ceci vous paraît-il complètement utopique voire irréalisable !! Vous pensez peut-être aussi : " Seul(e) dans ma petite école et de plus petit(e) temporaire, que voulez-vous que je change ?? " Là-dessus, je voudrais ici vous proposer trois déclencheurs qui pourraient alimenter votre réflexion et provoquer peut-être un mouvement de votre part vers le changement.
 1.  Utopie !! la signification de ce mot c'est : " non-endroit, nulle part " Mais une utopie réussit quand elle trouve un endroit où se poser. Y.K.
2.  Ne doutez jamais qu'un petit groupe de personnes engagées et motivées peut changer le monde ; d'ailleurs, rien d'autre n'y est jamais parvenu. " Never doubt that a small group of thoughtful, committed citizens can change the world " Margaret Mead .
    Margaret Mead ( 1901 - 1978 ). Née à Philadelphie, de parents enseignants et chercheurs en sciences sociales, Mead est une éminente sociologue, anthropologue, intellectuelle et scientifique américaine. Elle est célèbre et reconnue dans le monde entier pour être très engagée et pour avoir participé activement à promouvoir la dimension humaniste de l'anthropologie. Mead est une ressource de premier plan dans le domaine de l'éducation des enfants et de l'écologie. Elle est un des penseurs féminins les plus influents en sciences sociales. Elle s'intéressa surtout à l'influence du milieu socioculturel sur l'individu .
Mead a obtenu son baccalauréat ès arts en sociologie au Barnard College de New York où elle  développé un vif intérêt pour l'anthropologie. Elle se rend ensuite à l'université Columbia pour sa maîtrise et son doctorat. Elle a obtenu de nombreux diplômes honorifiques et a été membre de l'Académie américaine des Arts et des Lettres. Elle a également enseigné à l'Université Columbia, à New York University, Emory University, Yale University.  A 72 ans, elle a été élue à la présidence de l'association américaine pour l'avancement de la Science. Elle a publié 44 livres et plus de mille articles qui ont été traduits quasiment dans toutes les langues. Eu égard à son oeuvre, on peut affirmer que nul anthropologue n'a exercé autant d'influence sur sa société d'origine, qu'aucune anthropologue n'a suscité autant de polémiques - les deux phénomènes étant probablement liés. Ses débuts sur le terrain furent marqués par cette volonté particulière d'interroger une autre culture afin de répondre à des questions intrinsèques à la société américaine. Et cette confrontation entre mondes différents s'est poursuivie tout au long de sa vie, s'accentuant à mesure que l'expérience lui permettait d'accumuler des connaissances sur des sociétés de plus en plus nombreuses et diversifiées, à des périodes distinctes et dans des contextes historiques et politiques contrastés.
 3. L'école d'aujourd'hui manque d'utopie, c'est vrai, et un projet éducatif ne peut exister sans une dose minimale d'idéalisme. Y.K.

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